Hydrolats -II Science

Pratique de la préparation

Choix de l’eau :

De préférence une eau de source.

  1. Choix de la substance :

De préférence des plantes fraîches

« Chose curieuse, au commencement du siècle, la plupart des pharmacopées prescrivaient de préférence les plantes sèches, par la raison qu’elles donnaient seules des produits qui pouvaient se conserver; ce fait était vrai, parce que l’on n’avait alors à sa disposition que des appareils défectueux pour opérer la distillation. Mais aujourd’hui que le perfectionnement des alambics et la distillation à la vapeur permettent d’éviter les inconvénients d’autrefois, notamment le passage par entraînement mécanique des matières fixes dans l’eau distillée, il y a tout avantage à recourir à l’emploi des plantes fraîches.Des expériences de Descroisilles et de Buchner, confirmées par celles de M. Marais, on peut tirer les conclusions suivantes

1° Les eaux distillées des plantes fraîches peuvent se conserver plusieurs années quand elles ont été préparées avec soin et mises à l’abri de l’air et de la lumière

2° Elles ont une limpidité plus grande que celles qui sont obtenues avec les plantes sèches; en outre, leur arôme est toujours plus suave et plus développé.

Il y a cependant quelques exceptions à cette dernière règle principalement pour les végétaux suivants que l’on emploie de préférence après leur dessiccation: Fenouil. Lierre terrestre. Mélilot. Origan.Serpolet. Sureau. Tilleul. »
Bourgoin, 1880 (*4, p381)

2  Influence du métal utilisé durant la distillation :
Ambrosius Paré s’inquiète déjà en 1636 de la qualité des alambics pour la distillation des eaux et de la couleur verdâtre résultant de l’exposition des eaux distillées au cuivre à l’étain. (*22)
Quand on distille dans du cuivre des traces de cuivre se retrouvent dans les hydrolats (de 0,16mg/L à 7,05 ml/L), ce qui reste dans les normes de l’OMS qui recommande un apport journalier de 1,3mg/jour et un maximum de 10 mg/jour.
Les recherches de Annie Hartman portant sur les effets du cuivre comparés à la distillation en inox , montrent un certain intérêt pour la conservation des hydrolats (*23)
Claire Montesinos confirme, après une expérience de 20 années de distillation d’hydrolats que la distillation dans le cuivre donne un hydrolat de bonne qualité dès la sortie de l’alambic. (*24)
Le phénomène d’odeur empyreumatique des hydrolats distillés dans de l’inox mais aussi dans le verre est connu des distillateurs, odeur qui disparaît après quelques semaines.

Parties de la plante à employer :

Nous trouvons ici les mêmes précautions et règles que nous rencontrons avec la distillation des huiles essentielles.

Certaines plantes doivent être macérées quelque temps avant la distillation (cannelle, valériane).

  1. Choix du mode opératoire :

Les codex ont fixé les rendements pour chaque plante , on retire en règle général 1 kg d’hydrolat pour 1 kg de plantes

Filtrage

Le filtrage est préconisé pour la plus part des hydrolats, sauf utilisés dans un circuit très court.
Conservation :
La discussion sur la conservation des hydrolats est très ancienne, on admet en général que les hydrolats doivent être
renouvelés chaque année, exceptionnellement deux années.
L’usage des hydrolats est donc intimement lié à une production locale, de préférence à petite échelle, nous devons donc éviter autant que possible d’utiliser des hydrolats qui viennent de l’autre bout de la planète car le risque de contamination est proportionnelle à la distance parcouru par ces produits.
Étant donnée leur durée de vie assez réduite certains acteurs préconisent l’ajout de conservateurs (en harmonie avec les labels cosmétiques bio). Ceci est compréhensible du point de vue des créateurs de cosmétiques mais ne passe pas chez le consommateur en France.

Les faux hydrolats :
1. Eaux distillées alcoolisées
2. Eaux artificielles

Composition des hydrolats :

Lors de notre intervention ici même en mars 1999 avec Herviane Viaud (*8) nous avions démontré que pour les deux exemples choisis (Camomille romaine puis Menthe poivrée) la différence entre la composition de l’huile essentielle puis l’huile essentielle soluble dans l’hydrolat était très différente pour la camomille romaine, mais pratiquement identique dans le cas de la Menthe poivrée.
Les techniques d’analyse ont beaucoup évolué et il est maintenant possible d’analyser l’hydrolat beaucoup plus aisément
qu’en 1999. Nous trouvons donc en conséquence de plus en plus d’études concernant la composition des hydrolats.

Une étude comparative de la composition de 44 hydrolats et leurs huiles essentielles respectives (distillés par vapeur d’eau) démontre que 18 hydrolats sur les 43 comparés (42%) avaient un composant majeur différent des composants retrouvées dans l’huile essentielle. La concentration du composant était extrêmement bas comparé avec l’huile essentielle. La concentration du composant varie largement selon l’hydrolat, ce qui suggère une fluctuation de sa bio-activité. Différents composants uniques tel que pmenthane-3,8-diol et hydroxyangélate sont dominant dans les hydrolats mais pas dans l’huile essentielle. (*25)

Quelques exemples de la composition et de la teneur en huiles essentielles dans les hydrolats :

Hydrolat de Camomille allemande :(*26)
Un lot de camomille allemande (Matricaria recutita) , cultivé aux États-Unis donnait pour 1 litre d’hydrolat 6mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolats)
Sur les 38 composants détectés se trouvaient :

Hydrolat Moyenne dans l’huile essentielle (*33)(Europe)
Bisabolol oxide : A 72,35 % 50-58 %
Bisabolol oxide B 6,01 % 2-6 %
Yomogho alcohol 2,36 % –
Carvacrol 2,53 % –
Chamazulene 20-24 %

Hydrolat de Camomille romaine :(*30)
Un lot de camomille romaine (Anthemis nobilis), cultivé en Belgique, donnait pour 1 litre d’hydrolat 168mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolats)
Sur les 113 composants détectés se trouvaient : (* 31)

Hydrolat Moyenne dans l’huile essentielle (*33)

Isobutyl isobutyrate 1,15 % 4,56 %
isobutyrate d’amyle 2,69 %
angelate-d’isobutyle 34,21 %
angelate de methallyle 8,53 %
angelate de 2-methylbutyle 4,21 %
angelate d’isoamyle 16,24 %
Butane, ethenyl ethoxy methoxy 1,16 %
Pentyl acetate 0,15 %
Prenyl acetate 4,57 % 0,66 %
Hexyl isobutyrate 1,21 %
Prenyl ester 2,13 %
Linalol 15,04 % 0,15 % (linalol+ester angelique)
Pinocarvone 3,19 % 3,22 %
Trans-pinocarveol 5,97 % 4,58 %
-terpineol 2,25 %
isobutyl-3-hydroxy-2-methylene buteonate 3,88 %
myrtenyl+nerol 1,41 %
Géraniol 12,45 %
2-hydroxy-2-methylbut-3-enyl angelate 6,01 %
Methallyl ester 2,63 %

Hydrolat de Cataire citronné (*32)

Un lot d’hydrolat de Cataire (Nepeta cataria citriodora L ), cultivé en France et distillé par Cevenat, donnait pour 1 litre d’hydrolat 668 mg d’huile essentielle,140 mg de méthanol, 50 mg d’éthanol, 12 mg d’acétone.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolats)
Sur les 93 composants détectés se trouvaient : (* 31)

Hydrolat de Lavande (*26)

Un lot d’hydrolat de Lavande (Lavandula angustifolia Miller L ), cultivé en Belgique donnait pour 1 litre d’hydrolat 458 mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolats)
Sur les 104 composants détectés se trouvaient : (* 31)

Hydrolat Moyenne dans l’huile essentielle (*33)(Maillette)

Linalol cis-oxyde 2,52 % 0,51 %
Linalol 44,34 % 43,61 %
Linalyl acetate 0,05 % 34,82 %
Terpine-4-ol 10,72 % 0,16 %
Cryptone 3,50 % 0,03%(cryptone+lactone lavande)
-terpinéol 9,68 % 0,25 %
Nérol 1,18 % 0,08 %
Géraniol 4,18 % 0,20 %
Coumarin Mw=146 3,72 % 0,04 %

Hydrolat de Livêche plante (*32)

Un lot d’hydrolat de Livêche plante (Levisticum officinale L. ), cultivé en France par nos soins, donnait pour 1 litre d’hydrolat 36 mg d’huile essentielle,58 mg de méthanol, 2 mg d’éthanol
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolat)
Sur les 84 composants détectés se trouvaient : (* 31)
Hydrolat Analyse Huile essentielle même lot:(113 composants)

Hydrolat de Mélisse (*30)

Un lot d’hydrolat de Mélisse (Melissa officinalis L ), cultivé en Belgique donnait pour 1 litre d’hydrolat 202 mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolat)
Sur les 63 composants détectés se trouvaient : (* 31)
Hydrolat Moyenne dans l’huile essentielle (*33)
Rose cis-oxide 0,06 %
Rose trans-oxide 0,04 %
Linalol cis-oxide 0,10 %
1-octen-3-ol 1,62 %
-caryophyllène 16,79 %
Camphre 1,18 %
6-Methyl-5-Hepten-2-one 2,56 %
Linalol 2,66 %
Néral 17,97 % 22,47 %
Géranial 19,44 %
Citronellol 2,19 %
Nérol 3,33 %
Géraniol 6,48 %
Thymol 6,61 %
Carvacrol 28,89 %

Hydrolat de Menthe (*30)

Un lot d’hydrolat de Menthe poivrée (Mentha piperita L ), cultivé en Belgique donnait pour 1 litre d’hydrolat 376 mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolat)
Sur les 78 composants détectés se trouvaient : (* 31)

Hydrolat Moyenne dans l’huile essentielle (*33)(Mitcham)

1,8-cinéole 11,85 % 4,78 %
trans-thuyanol 1,29 % 0,24 %
Menthone 27,50 % 28,09 %
Isomenthone 5,86 % 4,27 %
Neomenthol 1,54 % 3,40 %
Terpine-4-ol 3,23 % 0,60 %
Menthol 23,74 % 36,89 %
Pulegone 1,18 % 0,81 %
Isomenthol 0,06 % 0,24 %
Piperitone 10,25 % 0,60 %
Carvacrol 1,23 % –

Hydrolat de néroli (* 28)
Trois lots d’hydrolat de Néroli (Citrus aurantium L.) donnèrent respectivement pour 1 litre d’hydrolat 0,015 ; 0,003 et 0,002mg d’huile essentielle.
Sur les 56 composants détectés se trouvaient :

Benzen acetaldehyde 5,5 % – –
cis-linalol oxyde 3,7 6,1 –
trans-Linalol oxide 1,1 3,8 –
Linalol 15,4 44,1 13,8
Limonène – – 46,6
Liac aldéhyde 2,1 – –
Terpine-4-ol 2,6 2,7 1,5
-terpinéol 20,7 2,6 6,6
Géraniol 26,6 – –
Indol 1,9 0,2 –
Méthyl anthranylate 4,9 11,8 –
Géranyl acétate 2,6 – –
trans-nérolidol 1,0 0,2 –

Les trois hydrolats provenaient de : 1 : Darab, dans le sud d’Ira,, distillé en laboratoire des fleurs séchées, 2 :producteur local ; 3 : qualité industrielle du marche (Camo Trade Mark). Le taux de limonène dans le lot 3 est probablement due à une adultération.

Hydrolat de Rose de Damas (*30)

Un lot d’hydrolat Rose de Damas (Rosa damascena) cultivé en Belgique, donnait pour 1 litre d’hydrolat 113 mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolat)
Sur les 62 composants détectés se trouvaient :(* 31)

Hydrolat Moyenne dans l’huile essentielle (*33)(Roumanie)
Linalol 1,43 % 8,77 %
Citronellol 12,46 % 28,81 %
Nérol 6,99 % 8,46 %
Géraniol 14,13 % 19,18 %
Nonadecane 0,11 % 10,41 %
Benzyl alochol 0,90 %
Phenylethyl alcohol 55,51 %

Hydrolat de Sureau :(*26)
Un lot de fleurs de Sureau (Sambucus nigra caerulea) , aux États-Unis, donnait pour 1 litre d’hydrolat 17 mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolat)

Sur les 42 composants détectés se trouvaient :

Hydrolat de Sapin Douglas (*26)

Un lot d’hydrolat de Sapin Douglas (Pseudotsuga Menziesii) venant des États-Unis, donnait pour 1 litre d’hydrolat 109 mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolat)
Sur les 105 composants détectés se trouvaient :

Hydrolat de Thym citronnée (*26)

Un lot d’hydrolat de Thym citronnée (Thymus x citriodora) venant des États-Unis, donnait pour 1 litre d’hydrolat 546mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolat)
Sur les 61 composants détectés se trouvaient :

Géraniol 68,29 %
Géranial 8,79 %
Nérol 4,57 %
Néral 6,93 %

Hydrolat de Thym carvacrol (*30)

Un lot d’hydrolat de Thym carvacrol (Thymus vulgaris CT carvacrol), cultivé en Belgique, donnait pour 1 litre d’hydrolat 505mg d’huile essentielle.
(1 kg de plantes pour 1 litre d’hydrolat)
Sur les 54 composants détectés se trouvaient :(* 31)

Les hydrolats des plantes in-odorantes :
Bourgoin remarquait déjà en 1880 que :
« On a cru pendant longtemps que les eaux distillées préparées avec les plantes inodores n’étaient chargées d’aucun principe particulier et ne digéraient, par suite, en aucune façon de l’eau pure. Mais Baumé le premier reconnut

  1. Que ces eaux distillées ont une odeur et une saveur que n’a point l’eau pure;
  2. Qu’elles éprouvent en vieillissant une altération qui se manifeste par des dépôts mucilagineux plus ou moins abondants;.
  3. Que toutes les huiles essentielles ne sont pas nécessairement odorantes. Il cite, à l’appui de cette proposition, les fleurs de noyer qui donnent à la distillation une quantité appréciable d’un produit blanc, volatil et inodore.

D’autre part, Delunel fit voir que l’eau distillée de bourrache se trouble par l’ammoniaque et prend une couleur violette par l’acide nitrique, preuve évidente qu’elle n’est pas formée d’eau pure; que l’eau distillée de morelle développe à chaud une odeur vireuse et laisse un notable résidu par une évaporation ménagée. Enfin, Dubuc a démontré que les eaux distillées de plantes inodores se congèlent à des températures différentes celles de laitue et de pourpier avant celle de pavot et à une température plus basse encore, celles de plantain et de chicorée. »  (*4)

Quelques recherches sur l’activité des hydrolats :

Activité antimicrobienne :

Une étude comparative de l’activité antimicrobienne des hydrolats de Basilic, Cardamome, Cannelle, Girofle et thym (Thymus schimperi) démontre l’activité inhibitrice certaine des hydrolats, dépendant de leur concentration .
(Staphylococcus aureus, E.coli, P.aerugenosa, S.typhi…) (*27)

Activité antioxydante :
Une étude comparative de l’activité antioxydante de différents hydrolats du Maroc (Lavandula officinalis L.;Origanum majorana, Rosmarinus officinalis, Thymus vulgaris, Cinnamomum verum J.Presl,Syzygium aromaticum (L.)Merril and Perry) ont confirmé une action certaine. (* 29)

Marché des hydrolats en France :

Les principaux hydrolats produits et commercialisés en France par différents acteurs en 2013:

En gras : hydrolats vendus par la majorité des vendeurs
(Liste non exhaustive).


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